JOHN McTIERNAN - DIE HARD / PIEGE DE CRISTAL (1988)

Piège à cons ?

Le premier d’une série qui semble (inter)minable (le cinquième est sorti en salles en ce début 2013). En tout cas le film qui a permis à Bruce Willis de confortablement matelasser son compte en banque.
C’était loin d’être gagné. Un gros budget alloué par la Fox au réalisateur John McTiernan sur la foi d’un seul film à succès (« Predator », lui aussi avec de multiples suites), et avec un casting de seconds couteaux. Le plus connu, le héros (parce que « Piège de cristal » est un film héroïque dans tous les sens du terme), c’est donc Bruce Willis, personnage principal d’une série télé policière, familiale à grosses ficelles  « Clair de lune ». Choisi après une liste de refus polis longue comme le bras où l’on retrouve des acteurs à l’époque autrement plus bankables (Schwarzie, Stallone, Pacino, Gere, …). Un Willis qui se retrouve entouré de quasi-inconnus, une habituée des seconds rôles (Bonnie Bedelia), un acteur de théâtre dont c’est le premier film (Alan Rickman), un gus venu de la danse classique (Alexander Godunov).
Bruce Willis : avec ce film, la sortie du tunnel ...
Le scénario est totalement simplet. Un flic new-yorkais (John McClane – Bruce Willis) venu passer Noel à L.A. pour voir ses enfants et qui sait, renouer avec sa femme (Bonnie Bedelia) dont il est séparé, va se retrouver emberlificoté dans une prise d’otages menée par un calculateur cruel (Hans Gruber – Alan Rickman). Seul contre tous les prétendus terroristes (en fait ils veulent piller un coffre), dans une gigantesque tour moderne inachevée, McClane va devoir survivre pieds nus (détail qui aura évidemment son importance), et va petit à petit dézinguer tous les méchants … Dans un déferlement de rafales d’armes automatiques, de cascades démentes, d’explosions à tout-va. Au prix aussi d’invraisemblances toutes les cinq minutes. Mais mine de rien, ce film reste un must du genre …
On y trouve le type sympa qui devient héros malgré lui, du suspens, de l’action, et une situation qui semble de plus en plus compromise, et qui, ô miracle, se conclut en happy end … Résultat : un très gros carton commercial surtout aux States, et un film dont des dizaines d’autres vont s’inspirer. Willis, c’est l’anti-Rambo et l’anti-Terminator, le type « normal », pas une machine à se battre ou à tuer. Plutôt un marrant, plutôt un trouillard, mais qui fait face au danger parce qu’il faut sauver sa peau d’abord, et accessoirement celle des autres … l’anti-héros devenant finalement indestructible, qui passe entre les balles, résiste aux explosions, et réussit des cascades (c’est Willis lui-même, il n’est pas doublé) défiant le bon sens et l’entendement.
Avec un montage malin qui entre montées d’adrénaline, ménage des pauses existentielles ou comiques. Derrière la caméra, John McTiernan. Qui n’est pas encore un cador, mais dont pas mal de films par la suite feront des cartons au box-office. Et qui mène habilement sa barque en mettant le paquet sur les effets spéciaux (pas de numérique à l’époque, ils ont réellement détruit un hélicoptère entre autres scènes « fumantes »). Utilisant aussi au mieux l’enceinte inquiétante du Fox Plaza (renommé Nakatomi Plaza pour le film), dont seuls certains étages ont été recréés en studio. Un McTiernan qui s’est inspiré (il a bien fait de le préciser dans les bonus du Dvd, ça saute pas aux yeux) de certaines scènes de « High noon » (« Le train sifflera trois fois » en français) et de « Orange mécanique » (la descente des terroristes du camion filmé comme la bande des Droogs, l’utilisation de la 9ème symphonie de Beethoven et de quelques mesures de « Singing in the rain », les deux réarrangées par Michael Kamen, lui étant une des pointures des B.O. de films).
Mme McClane et les preneurs d'otages
De toutes façons, le film est conçu comme une virée sur des montagnes russes d’action, on n’a pas trop le temps de se préoccuper de l’accessoire, faut se concentrer sur la baston globale à multiples rebondissements. Les personnages sont caricaturaux (souci lors de la sortie en Allemagne, les Teutons n’ont pas apprécié que tous les terroristes soient allemands, ils ont « américanisé » leurs prénoms), les méchants sont très méchants, les braves types sont vraiment braves, les journalistes sont crétins, le FBI et les flics de L.A. (certainement d’après la loi de Murphy, non l’autre, celui du « Flic de Berverly Hills ») très cons …
Dans ce maelström de crépitement d’armes automatiques, il y a selon moi une scène d’anthologie tellement elle est surréaliste : celle du premier face-à-face McClane – Gruber. Comment se fait-il que McClane ne le reconnaisse pas, puisqu’il l’a vu abattre le PDG japonais ? Pourquoi se méfie t-il ensuite en lui donnant un flingue déchargé ? Explication fournie par l’équipe du film dans les bonus : la scène n’était pas dans le scénario, elle a été rajoutée en cours de tournage (soit) ; quand le Japonais se fait buter, Willis est planqué derrière une table, il ne voit pas bien Gruber (ben … voyons) ; Gruber qui parle d’habitude avec un fort accent allemand, en prend un américain (sauf que dans la VF, ils ont oublié ce détail, il change pas de voix) ; et last but not least, Willis découvre que c’est un terroriste à cause de sa montre (toute la bande a les mêmes montres, ils les ont réglées ensemble au début de la prise d’otages … sauf que cette scène de réglages de montres a été coupée au montage) …
Mais bon, on l’a compris, « Piège de cristal » n’est pas là pour que son visionnage soit une prise de tête…
Et de ce côté-là, c’est parfaitement réussi, il a plus que bien vieilli et n’est pas ridicule face aux films plus récents bourrés de millions de dollars d’effets numériques. Pas un sommet du 7ème art pour moi, mais un classique de son genre, c’est sûr …